Page:Henry - Les Littératures de l’Inde.djvu/58

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tôt les dissipera en fumée ; ils rentrent à volonté les uns dans les autres, ils ne sont guère plus que des symboles. « Ceci esl la même chose que cela » : c’est la formule qui revient à tout moment dans tous les Brâhmanas : tandis qu’ils accusent une tendance mystique à multiplier le nombre des dieux, en déifiant une foule d’entités qui dans le Véda ne paraissent avoir qu’une personnalité métaphorique, — le Sacrifice, l’Année, etc., — ils le réduisent indéfiniment, au contraire, en enseignant que toutes ces entités se confondent entre elles et avec les dieux en chair et en os que célèbrent les hymnes. Rien de tout cela, bien entendu, n’est systématisé : le théologien éparpille ses identifications arbitraires, tantôt l’une, tantôt l’autre, au gré d’une pensée aussi peu fixée que celle du rêve ; mais, du jour où interviendra là dessus la puissante synthèse des Upanisads, toute cette grenaille fera balle, et le panthéon védique se trouvera, par une série indéfinie d’équations plus ou moins probantes, réduit tout entier, lui et l’univers, à l’unité pure. Les Brâhmanas, certes, n’en sont point encore là ; mais ils s’y acheminent rapidement, et leurs chapitres les plus récents y sont parvenus.

Cette unification ne s’opère point abstraitement, mais sous le couvert surtout d’un dieu nouveau que les Védas propres connaissent à peine : Prajâpati « le Maitre des créatures ». De ce nom, en quelque sorte commun, qui pourrait dans les Védas décorer