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mules caparaçonnées, portant rubans, grelots et panaches, entraînent au dehors les cadavres du cheval et du taureau.

« Dans ce drame sanglant, véritable scène d’abattoir, ce que je trouvai de plus extraordinaire, ajoute M. Ratisbonne, c’est la part qu’y prenait le public… Des femmes agitaient leurs mouchoirs, comme elles auraient pu le faire dans un cirque de Madrid ; des jeunes filles, la joue empourprée, l’œil en feu, restaient là, comme à l’opéra, souriant, à côté de leurs mères… Au moment où le matador tira son épée fumante du corps du taureau, je crus que le cirque allait s’écrouler… La vue du sang peut seule, on le croirait, causer une telle ivresse… Il y a, dans le cœur de l’homme, une bête féroce, qu’il faut se garder d’éveiller. »

Le lendemain, plusieurs taureaux furent immolés par des suppléants, qui firent très mal la besogne. Un d’eux perdit dans le corps d’une malheureuse bête jusqu’à sept coups d’épée — une ignoble boucherie ! Les spectateurs hurlaient, lui montraient le poing, l’appelaient chien, bourreau ! Mais tout à coup, le taureau fond, la corne basse, sur cet homme ahuri qui recule, hésitant et pâle. On crie alors : « Le lâche !