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Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/540

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Mais il y a des preuves plus palpables que toutes celles que peuvent donner les statistiques des tendances à la décadence de la civilisation. Il y a un sentiment de désappointement vague, mais général ; les classes ouvrières sont plus aigries que jamais ; on a partout le sentiment de l’instabilité et de la menace d’une révolution. Si ces sentiments étaient accompagnés d’une idée nette du remède à chercher, ce ne serait là qu’un signe heureux ; mais ce n’est pas. Bien que le maître d’école ait voyagé quelque temps, la faculté générale de relier l’effet à la cause ne paraît nullement augmentée. C’est ce que montre bien le retour au protectionnisme et d’autres illusions gouvernementales condamnées depuis longtemps[1]. Le libre penseur philosophique lui même ne peut pas observer le grand changement qui s’opère en ce moment dans le monde civilisé à propos des idées religieuses, sans sentir que ce fait important peut avoir des effets considérables que l’avenir seul verra se développer. Car ce qui s’accomplit ce n’est pas un changement dans la forme de la religion, mais la négation et la destruction des idées d’où sort la religion. Le christianisme ne se débarrasse pas simplement de superstitions, il est atteint mortellement à sa racine dans l’esprit du peuple ; de même les vieux paganismes mouraient quand le christianisme fit son apparition dans le monde. Et rien ne paraît pour prendre sa place. Les idées fondamentales d’un créateur intelligent et d’une vie future, s’effacent rapidement de l’esprit populaire. Qu’on se dispute si ceci est ou n’est pas un progrès, il n’en est pas moins vrai que l’importance du rôle que la religion a joué dans le monde prouve l’importance du changement qui s’effectue. A moins que la nature humaine n’ait soudainement changé sur un point que l’histoire générale de notre race montre des plus caractéristiques de l’homme, on peut pré-

  1. Au point de vue de la science de l’homme d’État, par exemple, des principes fondamentaux et de l’adaptation des moyens aux fins, la Constitution des États-Unis adoptée il y a un siècle, est bien supérieure aux dernières Constitutions d’État, dont la plus récente, celle de la Californie, est un chef-d’œuvre de bousillage.