Page:Hetzel - Verne - Magasin d’Éducation et de Récréation, 1903, tomes 17 et 18.djvu/328

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Je suis revenu. Les Anglais m’ont fait prisonnier, avec un éclat de bombe dans le bras… Ils m’ont relâché à la paix. J’ai été dans l’Inde… Au retour, on s’est encore battu… J’ai encore été pris… On a refait la paix… on m’a relâché… et me voici à Londres, en Angleterre, libre, pour faire sortir Manette de pension. Et je te retrouve.

— Manette en pension ! dit Manon ébahie. Et à Londres, près de nous ?

— Oui. Et vous ?

— Nous ? nous t’avons pleuré ! Grand-père et moi nous n’avons pas quitté d’ici… notre père, échappé par miracle à la mort, à Paris, a fini par nous rejoindre. Il a passé son temps à te chercher, en Bretagne, partout, sans trouver trace de toi. »

Et elle termina avec un cri :

« Nous avions renoncé, depuis huit ans ! Lettre sur lettre d’abord à Penhoël, Jeannie et Charlik disparus, le château brûlé.

— J’ai su.

— Le grand-père ne quitte plus son fauteuil ; quand il va te voir, il est capable de se lever… Mais il faut faire attention, le préparer, à son âge !… »

Le père et le grand-père supportèrent les émotions de ce retour, les joies de cette réunion. Le vieux baron reprit un courant de vie, son vieux visage éclairé de tout ce nouveau matin. Il disait maintenant, souvent, en se frottant les mains, en regardant Manette, revenue de pension et autant de la famille que si elle y était née :

« Je suis content !… je suis content ! »

On retourna en France. On rebâtit le château de Penhoël. On y célébra, quelques années après, le mariage d’un jeune officier de marine avec Mlle de Nérins ; et cette histoire est finie, car elle continua, et, on le sait, ceux qui sont heureux n’ont pas d’histoire.

Jacques Lermont.
FIN.

Le Directeur-Gérant : J. Hetzel