Page:Hetzel - Verne - Magasin d’Éducation et de Récréation, 1903, tomes 17 et 18.djvu/443

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jamais ce qui l’ennuie. La trouvez-vous quelquefois auprès de mère-vieux, quand vous y allez, l’après-midi ?

— Non.

— Vous voyez bien !… Quand on ne sait pas faire le sacrifice de ses préférences à une grand’mère, on n’est pas davantage capable d’élever des enfants. Ainsi, que plus jamais vous ne me parliez d’elle à ce propos, et que plus jamais vous ne la tourmentiez ; ou bien tante Brigitte vous emmène.

— Quand qu’elle s’en alle ? interrogea Lilou méditatif.

— Pas avant nous, c’est probable. Mais, si vous me désobéissez, elle partira dès demain et vous serez du voyage. »

La menace devait être terrible, car ils ne dirent plus mot.

Afin de couper court aux questions qu’il prévoyait, jugeant au reste que cette escapade ne méritait pas moins, Hervé mit ses fils aux arrêts dans leur chambre pour tout l’après-midi.

« Où allaient-ils ainsi ? » demanda Brigitte à son frère lorsqu’elle le vit redescendre après avoir enfermé lui-même les coupables.

De Kosen et Mme de Ludan étaient seuls sur le palier, où cette dernière était venue attendre.

« À Claire, je dirai qu’ils avaient pris les devants, sans plus ; mais la vérité, ajouta-t-il, regardant sa sœur dans les yeux, comme s’il eût voulu l’avertir d’être attentive, c’est qu’ils se rendaient en Russie, avec l’intention de demander pour moi la main de la petite cousine à son père.

— Il est temps que je te cherche une femme, mon ami ! c’est, je crois, le seul moyen de couper court à cette toquade.

— Toquade en effet, d’autant plus inexplicable de la part des enfants qu’elle n’est nullement encouragée ; cela, j’en suis absolument certain, insista-t-il, pour répondre au geste de doute esquissé par Brigitte.

— Je veux bien l’admettre, repartit la jeune femme avec un sourire ambigu ; mais je n’en persiste que davantage à te remarier, mon cher. Et… si je ne m’abuse, j’ai découvert… retrouvé, plutôt, la veille de mon départ, la perle que j’ambitionne pour belle-sœur. N’attends pas que je te la nomme : je veux que tu la voies sans savoir que c’est elle… Nous en reparlerons à Paris.

— Soit… » fit Hervé songeur.


(La suite prochainement.) P. Perrault.

KSOUR ET OASIS[1]

CHEVAUCHÉES D’UN FUTUR SAINT-CYRIEN À TRAVERS LE SUD-ORANAIS

V

La Koubba de Sidi-Cheikh. — La mort de Si Kaddour ben Hamza.


La poudre s’était tue ; le calme avait succédé à l’agitation ; les caravanes, de l’autre côté des ksour, s’échelonnaient dans la direction du Sud ; les Abid, sans doute, supputaient chez eux le gain de la ziarra.

Nous nous sommes approchés de la Koubba avec l’intention de la visiter. Le massif cube blanc, surmonté d’une coupole, émerge du milieu d’une enceinte murée. Il est divisé, intérieurement, en deux parties inégales.

La porte d’entrée s’ouvre sur la plus étroite, que barre un premier tombeau, recouvert d’un burnous rouge maintenu debout. Sous ce manteau de spahi, le plus jeune fils de Sidi-Cheikh semble monter la garde dans le vestibule de la dernière demeure paternelle. Hélas ! il n’a pu empêcher l’infidèle de la profaner !

  1. Voir les nos 180 et suivants.