Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/243

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peut s’imaginer qu’il est toujours à deux doigts de sa ruine, lorsqu’il pense que le souverain, non seulement peut ordonner les punitions que bon lui semble, à quelques fautes que ce soit, mais que même il peut maltraiter ses sujets innocents, poussé d’un mouvement de colère, ou de quelque autre passion déréglée. Certainement, c’est là un fâcheux inconvénient, lorsqu’il arrive en quelque sorte de gouvernement que ce soit. Je dis lorsqu’il arrive, car il ne suffit pas qu’il puisse arriver, s’il ne se fait sentir effectivement. Mais, c’est encore un défaut de celui qui gouverne, plutôt que du gouvernement et on ne doit pas imputer les actions d’un Néron comme essentielles à la monarchie. Toutefois, j’ose bien dire qu’il y a beaucoup moins de personnes innocentes condamnées par un homme seul, que par tout un peuple. D’autant que les rois ne font du mal et n’exercent de cruauté que contre ceux qui les inquiètent par des conseils hors de saison, qui usent contre eux de paroles injurieuses, ou qui s’opposent directement à leur volonté. Et ils n’en viennent guère à cette rigueur que pour se mieux assurer de la puissance absolue qu’ils veulent avoir incontestablement sur leurs sujets. De sorte que sous le règne d’un Néron ou d’un Caligula, il n’y a que ceux de sa connaissance, que les courtisans, ou que quelques personnes en charge éminente, qui puissent être injus­tement persécutés ; et même, il faut qu’