Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/506

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que mon sentiment doive être la règle de celui des autres. le crois bien plutôt qu’il a été fort bien dit, que chacun abonde en son sens ; et que de même qu’en un festin on laisse à chacun la liberté de manger la viande qui est le plus à son goût ; aussi en la lecture des livres, on ne doit contraindre personne, mais permettre à chacun de goûter, comme bon lui semble, les endroits qu’il trouve les meilleurs, sans déclamer pourtant contre les autres.

Et certes, il est à craindre que ceux qui y procèdent autrement et qui ne gardent pas cette modération, ne se démentent enfin eux-mêmes et ne tombent en quelque honteuse contradiction. Car n’étant pas toujours disposés d’une même sorte, combien de fois nous peut-il arriver de changer de sentiment, et de comprendre, en une lecture réitérée, ce par-dessus quoi nous avons passé et que nous n’avions pas entendu à la première. Il n’y a aucun de nous à qui peut-être cela ne soit arrivé fort souvent, et cependant nous avons peu profité de ces expériences de la faiblesse de notre esprit, nous laissant emporter ensuite à la témérité de condamner tout ce qui est échappé à l’attention d’une première lecture.