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voir qualifié la Vierge d’Espoir des dieux, mis dans ses mains les vers des sibylles au lieu des Psaumes, oubliant sans doute que Sannazar se conformait ainsi au goût du temps, et que s’il s’y fût soustrait son poème eût reçu un accueil peu flatteur. Les deux Scaliger et surtout, de nos jours, M. Saint-Marc-Girardin ont jugé ce poème comme il doit l’être. L’Arcadia, mélange de prose et de vers, est écrite, dit Cl. Lancelot, avec une délicatesse et une naïveté merveilleuses. Éloge que confirme Tiraboschi, en l’exagérant un peu toutefois : « L’élégance du style, la propriété et le choix des expressions, les descriptions, les images, tout, on peut le dire, est nouveau et original dans l’Arcadia, et ce n’est pas merveille si elle eut dans ce siècle (seizième siècle) environ soixante éditions. » Les Eclogæ, au nombre, de six, forment, d’après Paul Giovio, l’œuvre la plus parfaite de Sannazar ; les bergers classiques y sont remplacés par des pécheurs, les mœurs et les travaux des campagnes par les mœurs et les travaux des populations qui habitent les rivages de la mer. Les Rime renferment des satires, des épigrammes mordantes et des élégies parfois fort tendres.

L’œuvre de Sannazar se compose des ouvrages suivants : Arcadia ; Venise, 1502 (contre l’intention de l’auteur) ; Naples, 1504, in-4o, et Milan, 1808, in-8o ; trad. en français par Jean Martin (Paris, 1544, in-8o) et par Pecquet (Paris, 1737, in-12) ; — Sonetti e Canzoni ; Naples, 1530, in-4o, et Venise, 1534, in-8o. L’Arcadia, les Sonetti et les Canzoni ont été réimpr. à Padoue ; 1753, in-4o ; — Eclogæ VI, Elegiarum libri III, Epigrammatum lib. III, De morte Christi, ad mortales Lamentatio, et De partu Virginis lib. III ; Naples, 1526, pet. in-fol. ; Venise, 1528-1535, in-8o ; Lyon, 1547, in-16 ; Amst., 1689, in-12, et 1728, in-8o. Le De partu Virginis a été traduit en vers italiens par Jean Giolito de Ferrari ; Vérone, 1732, in-4o, etpFar Casarege ; Florence, 1740, in-8o ; en français par Guillaume Colletet ; Paris, 1645, in-12. Ach. Genty.

Crispo, Vita di Sannasaro. — J.-A. Volpi, Sannasaris Vita. — Niceron, VIII. — Angelis, Sannazar. Biografia degli uomini ill. del regno di Napoli, t. II. — Tiraboschi, Storia della letterat. ital., VII, part. 3. — Saint-Marc Girardin, Tableau de la littér. fr. au seizième siècle, p.137 et suiv.

SANO DI PIETRO. Voy. Lorenzetti.

SANSON (Nicolas), ingénieur et géographe, né à Abbeville, le 31 décembre 1600, mort à Paris, le 7 juillet 1667. Sa famille, originaire d’Ecosse, était une des plus distinguées du comté de Ponthieu. Son père le fit élever chez les jésuites d’Amiens, et l’initia aux études géographiques, qu’il cultivait lui-même avec succès. À l’époque où il vivait, les conquêtes de la navigation étaient incomplètes ; les procédés de la géométrie, les observations manquaient à la géographie. Cependant Sanson, par une


sorte de divination, bien jeune encore, se montra le glorieux émule des géographes étrangers Ortélius et Mercator : âgé de dix-huit ans, il entreprit la savante carte des Gaules, consultée pendant longtemps comme le guide le plus sûr des positions stratégiques romaines. Familier avec les langues anciennes, il écrivit, dans un latin élégant et pur, des dissertations sur la géographie ancienne et moderne. Exact, ingénieux hardi, il franchit les limites de la science, qu’il enrichit. Au lieu de se borner aux cartes de détails, il s’empara des deux hémisphères, reproduisit chaque partie du globe sous la forme concise et à la place que la nature lui assigna ([1]), marqua avec précision le berceau des différentes races humaines. Il ouvrit ainsi la voie aux études ethnologiques. Il joignit à ces grandes vues d’ensemble l’exactitude et la clarté des détails ; on admire surtout ces qualités dans les cartes des diocèses de France, dans celles de l’Allemagne, des Pays-Bas, et du cours du Rhin. Présenté au cardinal de Richelieu en 1625, Sanson reçut le titre de géographe du roi et la charge d’ingénieur en Picardie ; il donna des leçons de géographie à Louis XIII et plus tard au jeune Louis XIV. Les travaux de fortification, dont il avait à s’occuper à Abbeville et dans les autres villes de son pays natal l’y ramenaient souvent, et il s’y trouvait à l’époque où le cardinal de Richelieu y conduisit Louis XIII à Ponthieu. Les autorités locales préparaient un somptueux logement ; mais le roi ne voulut habiter que la demeure du géographe. On se disposait à prendre le cabinet de travail de Sanson, afin d’agrandir la chambre royale ; le souverain ne le permit pas, et dit qu’il se ferait un scrupule d’envahir le sanctuaire de la science. Il visita, accompagné de son ingénieur, les fortifications de la place. À son départ, Louis lui remit le brevet de conseiller d’État, transmissible à la postérité du titulaire ; mais le savant refusa l’hérédité, de peur, dit-il, d’affaiblir dans ses enfants l’amour de l’étude.

Affaibli par de profondes études, miné depuis longtemps par les incessants regrets de la perte de l’aîné de ses fils, Sanson dépérissait depuis plusieurs années. D’illustres visiteurs venaient souvent jouir de son entretien ; de grands dignitaires, de savants marins, des maréchaux de France, le prince de Conti et le grand Condé lui-même s’empressaient de recueillir dans les doctes causeries de ce fameux investigateur du globe les enseignements profitables à leur profession. Sanson mourut à soixante-sept ans, et fut inhumé dans l’église Saint-Sulpice. Ses principaux élèves furent ses fils (voy. ci-après), son neveu Dul et le père de Guillaume Delisle.

  1. (1) Les observations astronomiques des jésuites des extrémités de l’Asie sont postérieures aux cartes de Sanson ; il avait dû suivre les bases de Ptolémée ; il se trompa donc sur l’étendue de la Méditerranée, des bords de l’Asie aux confins de l’Atlas.