Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/127

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sous le rapport des avantages physiques. » Puis il s’avança vers le petit et lui dit : « J’espère, honorable monsieur Cinabre, que votre chute de cheval d’hier n’aura pas eu de suites fâcheuses ? » Mais Cinabre se redressa à ces mots sur la pointe des pieds, en rejetant la tête en arrière, et, s’étayant d’une petite canne qu’il portait à la main, de telle sorte qu’il atteignait ainsi à peu près la ceinture de Balthasar, il dit d’une voix singulièrement ronflante et creuse, en dirigeant sur lui de bas en haut des regards étincelants et farouches : « Qu’est-ce à-dire, s’il vous plait, monsieur ! et de quoi parlez-vous ? — Tombé de cheval ? moi tombé de cheval ! — Vous ignorez apparemment que je suis le meilleur cavalier qu’il y ait. Apprenez, monsieur, que je ne tombe jamais de cheval, que j’ai fait la dernière campagne en qualité de volontaire dans les cuirassiers, et que je donnais des leçons d’équitation aux officiers et aux soldats comme instructeur de manège ! — Hm ! — hm ! tomber de cheval, — moi, tomber de cheval ! » —

Il voulut alors se retourner brusquement, mais la canne sur laquelle il s’appuyait glissa, et le nain de rouler par terre dans les jambes de Balthasar. Celui-ci étendit la main aussitôt pour soutenir le petit homme et l’aider à se relever ; mais il le toucha à la tête par mégarde, et le petit sapajou poussa un cri si perçant, que tout le salon en retentit, et que les assistants se levèrent effrayés de leurs sièges. On entoura soudain Balthasar, et on lui demanda de toutes parts au nom du ciel quel motif lui avait ar-