Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/257

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rouges, un chapeau blanc surmonté d’une plume rouge, et un manteau court de même couleur, Leporello se trémousse autour de lui. Les traits contractés de son visage expriment un singulier mélange de bonhomie, d’astuce, de cupidité et d’effronterie sardonique. La tête et la barbe grisonnante de l’acteur produisaient un vif contraste avec la noirceur de ses sourcils. On devine que le vieux drôle est vraiment fait pour servir de second à Don Juan.

Ils se sont sauvés avec bonheur en escaladant un mur. — Des torches brillent ; on voit reparaître donn’Anna, suivie d’Octavio, un petit homme coquet, paré et compassé, âgé de vingt et un ans tout au plus. En qualité de fiancé de donn’Anna, il était probablement logé dans la maison, puisqu’on a pu l’avertir si promptement. Il aurait pu, au premier bruit qu’il entendit, accourir, et peut-être sauver le vieillard : mais il fallait d’abord qu’il s’ajustât de pied en cap ; et d’ailleurs, il n’aime pas se hasarder à sortir la nuit.

Ma qual mai s’offre, o Dei, spettacolo funesto agl’ occhi miei4. — C’est plus que du désespoir inspiré par un crime affreux qu’expriment les tons lamentables et déchirants de ce récitatif et du duo suivant. Les sons brisés et haletants qu’exhale cette poitrine oppressée n’ont-ils pas d’autre mobile que l’odieux attentat dont elle devait être seule victime, et qui cause la mort de son père ? Oui, une lutte intérieure et dévorante peut seule en produire de semblables… Pendant la scène où la grande et maigre donn’Elvira, offrant encore les traces visibles d’une beauté