Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/259

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Les masques paraissent ; leur trio est une prière qui monte aux cieux en purs et lumineux rayons. — Et puis, le rideau du fond s’ouvre tout-à-coup : oh ! quelle ardeur de plaisir ! les coupes s’entrechoquent, les paysans et toutes sortes de gens masqués conviés à la fête de Don Juan se croisent et se confondent dans un tumulte joyeux. — Mais voici les trois conjurés pour la vengeance ! Tout prend un aspect plus solennel, jusqu’à ce que les quadrilles se forment.

. . . . . . . . . . . Zerlina est sauvée ! Et dans le finale orageux et retentissant, Don Juan s’avance bravement, l’épée nue à la main, au-devant de ses ennemis. Il fait sauter des mains d’Ottavio sa frêle épée de parade et se fraye un passage à travers cette vile canaille qu’il culbute comme le vaillant Roland triomphant de l’armée du tyran Cymork, de sorte qu’ils tombent les uns sur les autres de la manière la plus divertissante.

J’avais déjà cru sentir plusieurs fois derrière moi une haleine douce et chaude, et distinguer le frôlement d’une robe de soie. Cela me fit bien soupçonner la présence d’une femme ; mais, tout-à-fait absorbé par les visions poétiques que le drame faisait surgir devant moi, je n’y arrêtai pas mon attention. Quand, à la fin de l’acte, on eut baissé le rideau, je me détournai pour voir ma voisine. — Non ! — aucun mot ne saurait exprimer ma surprise : donn’Anna, revêtue absolument du même costume sous lequel elle venait de paraître sur le théâtre, était auprès de moi, et, de son œil expressif, fixait sur moi un regard pénétrant. Je restai béant et muet d’étonn-