Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/263

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Don Juan était attablé folâtrant entre deux jeunes filles, et il faisait sauter bouchon sur bouchon, afin de se livrer à l’influence des esprits fermentant dans leurs étroites prisons. C’était une petite chambre avec une grande croisée gothique dans le fond, à travers laquelle on voyait la nuit. Déjà, pendant qu’Elvira reprochait à l’infidèle ses serments trahis, de vifs éclairs sillonnaient les ténèbres, de sourds et lointains grondements annonçaient l’orage. Bientôt l’on entend frapper violemment à la porte. Elvira, les jeunes filles se sauvent, et aux effrayants accords du monde souterrain des esprits, l’on voit entrer le terrible colosse de marbre, auprès duquel Don Juan semble un pygmée. Le plancher tremble sous les pas sonores du géant. Don Juan crie à travers le fracas de la tempête, les éclats de la foudre, les hurlements des démons, son terrible Nò ! l’heure de sa chute a sonné. —

La statue disparaît, une épaisse vapeur obscurcit la chambre, et d’effroyables fantômes surgissent de toutes parts. Don Juan se débat dans les tourments de l’enfer, et, par intervalles, on l’aperçoit luttant contre les démons. Une explosion comme si la terre croulait !… Don Juan, les démons ont disparu on ne sait comment. Leporello est étendu seul dans un coin de la chambre. — Quelle sensation de bien-être produit alors l’arrivée des autres personnages qui cherchent en vain Don Juan, soustrait à la vengeance des hommes par les puissances souterraines ! Il semble que de ce moment seulement on échappe au monde terrible des esprits infernaux.