Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/362

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excellent baron, dit le comte en souriant avec complaisance ; mais avez-vous déjà fait quelque démarche significative près de la comtesse ? êtes-vous aimé ? Moi, comme un véritable fou, je suis excessivement partisan de l’amour !” — Je racontai au comte comment la chose s’était passée pendant la contredanse. Ses yeux étincelaient de plaisir : “C’est charmant ! délicieux, en vérité ! s’écria-t-il coup sur coup. — Montrez-moi un peu cette passe, cher baronetto, ajouta-t-il un moment aprés, je vous en prie.” Je figurai la passe et je me posai dans la position que j’ai déjà décrite. “Charmant ! mon divin ami, tout à fait charmant sur ma parole !” s’écria le comte extasié. Il sonna sur-le-champ, et cria par la porte : “Cochenille ! Cochenille !”

» Quand Cochenille fut arrivé, il fallut que je lui chantasse l’air de la seize que j’avais composé moi-même. “Prenez votre flageolet, Cochenille, dit le comte, et jouez ce que monsieur le baron vient de chanter.” Cochenille exécuta assez bien ce qu’on lui ordonnait. Il me fallut alors jouer le rôle de la dame et danser avec le comte, qui voltigeait avec une légèreté dont je ne l’aurais jamais cru capable à son âge, et qui, au moment décisif, balançant avec coquetterie sur la pointe du pied droit, me murmura à l’oreille : “Ô le plus exquis des barons, ma fille Victorine est à vous !”

» La charmante Victorine faisait la coquette, comme c’est du reste l’habitude des jeunes filles. Elle restait silencieuse et grave, ne disant ni oui ni non, et même ses manières à mon égard détruisirent peu à peu