Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/391

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la joyeuse impression des scènes merveilleuses dues à la bizarre imagination de Reutlinger, et dans lesquelles nous voici comme encadrés. Vois-tu là-bas cet arbre dont le vent balance çâ et là les énormes fleurs blanches ? Ce ne peut pas être le Cactus grandiflorus, car il ne fleurit qu’à minuit, et je ne sens pas non plus l’arôme pénétrant qu’il devrait exhaler. — Dieu sait quel arbre miraculeux le conseiller a encore transplanté dans son Tusculum. » Les amis se dirigèrent de ce côté, et ils ne furent pas médiocrement surpris à la vue d’un massif de sureaux dont les fleurs n’étaient autre chose que des perruques poudrées à blanc suspendues à ses branches, et qui se balançaient de haut en bas avec leurs bourses ou leurs petites queues pendantes, jouet capricieux du vent du sud. De bruyants éclats de rire derrière les arbres trahirent la présence de leurs propriétaires. Plusieurs vieux messieurs, tous dispos et alertes, s’étaient réunis sur une verte pelouse entourée de buissons fleuris. Après avoir ôté leurs habits et accroché aux branches les incommodes perruques, ils jouaient ensemble au ballon. Mais personne ne surpassait en adresse le conseiller Reutlinger, qui lançait à chaque coup le ballon à une hauteur prodigieuse, et d’une façon si habile, qu’il retombait juste aux pieds de son partner.

En ce moment, on entendit une musique discordante de fifres aigus accompagnés de tambours. Les joueurs s’interrompirent aussitôt, et reprirent à la hâte leurs habits et leurs perruques. « Qu’est-ce donc encore que cela ? dit Ernest. — Je parie, repartit