Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/479

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La noce de Gabrielle approchait. Elle remarqua un soir avec surprise qu’on chargeait plusieurs fourgons, dans la cour du château, de meubles, de caisses de linge, de vaisselle, bref d’un matériel de maison complet, et vit bientôt après les voitures s’éloigner. Le lendemain matin, elle apprit qu’Angélique, accompagnée du valet de chambre du comte de S*** et d’une femme déguisée qui ressemblait à la vieille et grande bohémienne, était partie la nuit même. Le comte Z*** donna l’explication de cette énigme en déclarant qu’il s’était vu obligé, par des raisons majeures, de souscrire aux désirs, singuliers à la vérité, de sa fille, qui avait sollicité de lui non-seulement le don en toute propriété de la maison de B.... dans l’avenue, mais encore la liberté d’y vivre isolément et dans la plus parfaite indépendance, sous la réserve expresse qu’aucun membre de la famille, sans en excepter lui-même, n’y mettrait jamais les pieds sans la permission de la comtesse. Le comte de S*** ajouta que, sur les vives instances d’Angélique, il avait dû lui céder son valet de chambre, qui était parti avec elle pour B....

Après la célébration du mariage, le comte se rendit à D.... avec sa femme, et pendant un an ils jouirent d’une félicité que rien ne vint troubler. Mais la santé du comte s’altéra ensuite d’une manière tout-à-fait étrange. Une souffrance intérieure semblait lui ravir tout plaisir et toute énergie vitale, et les efforts de sa femme, pour lui arracher le secret qui minait aussi funestement tout son être, restaient sans succès. Lorsqu’enfin de fréquentes et