Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/685

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MOI.

Et cela te rebuterait ?

BERGANZA.

Ah ! mon ami, permets-moi d’être sincère ! je suis un chien à la vérité, mais c’est un avantage moins précieux de marcher debout, de porter des culottes et de bavarder incessamment suivant sa fantaisie, que de nourrir en soi, dans un recueillement silencieux, un pieux sentiment de la nature qui pénètre dans sa sainte profondeur, et constitue la véritable poésie. À une époque illustre et reculée, sous le ciel du midi qui échauffe toutes les créatures de son ardeur féconde, et provoque les êtres animés à un perpétuel concert d’allégresse, malgré ma condition infinie, j’ai entendu les chants des hommes décorés alors du nom de poètes ! Le secret de leur art était de chercher avec un zèle passionné à reproduire ces merveilleux accords variés à l’infini, d’où résulte l’harmonie universelle de la nature. Ils dévouaient, ils consacraient leur vie à la poésie, et la regardaient comme la plus sainte mission que l’homme pût recevoir de la nature, de Dieu !

MOI.

J’admire, Berganza, la couleur poétique de tes expressions.

BERGANZA.

Je te l’ai déjà dit, mon ami, dans mon bon temps,