Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/319

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Peut-être réussirai-je, ainsi qu’un bon peintre de portraits, à vivifier si bien quelque figure, que tu la trouves ressemblante sans en connaître l’original, et que tu t’imagines même avoir vu souvent le modèle de tes propres yeux. Peut-être alors, cher lecteur, en viendras-tu à croire que la vie réelle est pleine de merveilleux et de fantastique, et que le poète n’en peut saisir les rapports secrets que comme les reflets obscurs d’une glace dépolie.

Pour compléter les premiers éclaircissements nécessaires à l’intelligence de cette histoire, il faut ajouter aux lettres précédentes que, peu de temps après la mort du père de Nathanael, Clara et Lothaire, enfants d’un parent éloigné, dont la mort également récente les avait laissés orphelins, furent recueillis par la mère de Nathanael dans sa propre maison. Clara et Nathanael éprouvèrent, l’un pour l’autre, un vif penchant auquel personne au monde n’avait rien à objecter. Ils étaient, en conséquence, promis ou fiancés, lorsque Nathanael s’absenta pour continuer ses études à G...., où il est en ce moment, et où il suit les cours du professeur de physique Spallanzani.

Je pourrais donc maintenant continuer tranquillement mon récit ; mais voici l’image de Clara qui surgit devant moi d’une manière si frappante que je ne puis en détourner les yeux, ce qui ne manque pas d’arriver chaque fois qu’elle m’adresse un de ses sourires enchanteurs. — Clara ne pouvait certainement passer pour belle, tous les experts et connaisseurs en cette matière s’accordaient à le dire. Cependant les architectes vantaient les élégantes