Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/113

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que renonçant au témoignage de ses sens, il se laissera guider par l’enthousiasme & l’autorité.[1]

Si nous voulons nous faire des idées claires de notre ame, soumettons la donc à l’expérience, renonçons à nos préjugés, écartons les conjectures théologiques, déchirons des voiles sacrés qui n’ont pour objet que d’aveugler nos yeux & de confondre notre raison. Que le physicien, que l’anatomiste, que le medecin réunissent leurs expériences & leurs observations pour nous montrer ce que nous devons penser d’une substance qu’on s’est plû à rendre méconnoissable ; que leurs découvertes apprennent au moraliste les vrais mobiles qui peuvent influer sur les actions des hommes ; aux législateurs les motifs qu’ils doivent mettre en usage pour les exciter à travailler au bien-être général de la société ; aux souverains les moyens de rendre véritablement & solidement heureuses les nations soumises à leur pouvoir. Des ames physiques & des besoins physiques demandent un bonheur physique & des objets réels & préférables aux chimeres dont depuis tant de siécles on repaît nos esprits. Travaillons au physique de l’homme, rendons le agréable pour lui, & bientôt nous verrons son moral devenir & meilleur & plus fortuné ; son ame rendue paisible & sereine, sa volonté déterminée à la vertu par les motifs naturels & palpables qu’on lui présentera. Les soins que le législateur donnera au physique formeront des citoyens sains, robustes & bien con-

  1. Si l’on veut se faire une idée des entraves que la Théologie a données aux génies des philosophes chrétiens, l’on n’a qu’à lire les romans métaphysiques de Leibnitz de Descartes, de Malebranche, de Cudworth, &c & examiner de sang froid les ingénieuses chîmeres connues sous les noms de systemes de l’harmonie préétablie, des causes occasionnelles, de la prémotion physique, &c.