Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/154

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regarder comme nécessaires à leur repos & comme dangereux à guérir[1].

L’éducation n’est que l’art de faire contracter aux hommes de bonne heure, c’est-à-dire quand leurs organes sont très flexibles, les habitudes, les opinions & les façons d’être adoptées par la société où ils vivront. Les premiers momens de notre enfance sont employés à faire des expériences ; ceux qui sont chargés du soin de nous élever, nous apprennent à les appliquer, ou développent la raison en nous ; les premières impulsions qu’ils nous donnent décident communément de notre sort, de nos passions, des idées que nous nous faisons du bonheur, des moyens que nous employons pour nous le procurer, de nos vices & de nos vertus. Sous les yeux de ses maîtres l’enfant acquiert des idées, il apprend à les associer, à penser d’une certaine maniere, à juger bien ou mal. On lui montre différens objets qu’on l’accoutume à aimer ou haïr, à desirer ou fuir, à estimer ou mépriser. C’est ainsi que les opinions se transmettent des pères, des mères, des nourrices, des maîtres aux enfans : c’est ainsi que l’esprit se remplit peu-à-peu de vérités ou d’erreurs, d’après lesquelles chacun regle sa conduite, qui le rend heureux ou malheureux, vertueux ou vicieux, estimable ou haïssable pour les autres, content ou mécontent de sa destinée, suivant les objets vers lesquels on a dirigé ses passions & l’énergie de son esprit, c’est-à-dire, dans lesquels on lui a montré son intérêt ou sa félicité : en conséquence il aime & cherche ce qu’on lui a dit d’ai-

  1. Assiduitate quotidiana & consuetudine oculorum animi, neque admirantur neque requirent rationes earum rerum quas vident. Cicero De Natur. Deorum. Lib II Cap. 2.