Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/162

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objets qui les excitent, tels que les plaisirs, la grandeur, les richesses, qui produisent la volupté, l’ambition, la vanité, l’avarice. Si nous examinons attentivement la source des passions dominantes dans les nations, nous la trouverons communément dans leurs gouvernemens. Ce sont les impulsions de leurs chefs qui les rendent tantôt guerrières & tantôt superstitieuses ; tantôt avides de gloire, tantôt avides d’argent ; tantôt sensées, tantôt déraisonnables ; si les souverains, pour éclairer & rendre heureux leurs états, employoient la dixieme partie des dépenses qu’ils font & des soins qu’ils se donnent pour les abrutir, les tromper & les affliger, leurs sujets seroient bientôt aussi sages & fortunés qu’ils sont aveugles & misérables.

Ainsi que l’on renonce au vain projet de détruire les passions dans les cœurs des hommes ; qu’on les dirige vers des objets utiles pour eux-mêmes & pour leurs associés. Que l’éducation, le gouvernement & les loix les habituent à les contenir dans les justes bornes fixées par l’expérience & la raison. Que l’ambitieux ait des honneurs, de tîtres, des distinctions & du pouvoir, quand il servira utilement sa patrie : que l’on donne des richesses à celui qui les desire, quand il se rendra nécessaire à ses concitoyens ; que l’on encourage par des louanges celui qui aimera la gloire ; en un mot que les passions humaines aient un libre cours, quand il en résultera des avantages réels & durables pour la société. Que l’éducation & la politique n’allument & ne favorisent que celles qui sont avantageuses au genre humain & nécessaires à son maintien. Les passions des hommes ne sont si dangereuses que parceque tout conspire à les mal diriger.