Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/195

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certains & invariables qui subsistent entre les êtres de l’espece humaine, les notions vagues de la théologie ; ou en fondant cette morale sur des êtres chimériques qui n’existent que dans notre imagination, on rend cette morale incertaine & arbitraire, on l’abandonne aux caprices de l’imagination, on ne lui donne aucune base solide.

Des êtres essentiellement différens pour l’organisation naturelle, pour les modifications qu’ils éprouvent, pour les habitudes qu’ils contractent, pour les opinions qu’ils acquiérent, doivent penser différemment. Le tempérament, comme on a vu, décide des qualités mentales des hommes, & ce tempérament lui-même est diversement modifié chez eux : d’où il suit nécessairement que leur imagination ne peut être la même ni leur créer les mêmes phantômes. Chaque homme est un tout lié, dont toutes les parties ont une correspondance nécessaire. Des yeux différens doivent voir différemment & donner des idées très variées sur les objets, même réels, qu’ils envisagent. Que sera-ce donc si les objets n’agissent sur aucun des sens ! Tous les individus de l’espece ont en gros les mêmes idées des substances qui agissent vivement sur leurs organes, ils sont tous assez d’accord sur quelques qualités qu’ils apperçoivent à-peu-près de la même maniere ; je dis, à-peu-près, parce que l’intelligence, la notion, la conviction d’aucune proposition, quelque simple, évidente & claire qu’on la suppose, ne sont ni ne peuvent être rigoureusement les mêmes dans deux hommes. En effet un homme n’étant point un autre homme, le premier ne peut avoir rigoureusement & mathématiquement la même notion de l’unité, par exemple, que le second ; vû qu’un effet iden-