Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/209

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ne peut ni vouloir ni agir, il attend qu’une des deux causes qui le meuvent ait pris assez de force pour déterminer sa volonté, pour l’attirer d’une maniere qui l’emporte sur les efforts de l’autre cause.

Ce méchanisme si simple & si naturel suffit pour nous faire connoître pourquoi l’incertitude est pénible & la suspension est toujours un état violent pour l’homme. Le cerveau, cet organe si délicat & si mobile, éprouve alors des modifications très rapides qui le fatiguent, ou lorsqu’il est poussé en des sens contraires par des causes également fortes, il souffre une sorte de compression qui l’empêche d’agir avec l’activité qui lui convient pour la conservation de l’ensemble & pour se procurer ce qui est avantageux. Ce méchanisme explique encore l’irrégularité, l’inconséquence, l’inconstance des hommes, & nous rend raison de leur conduite qui paroît souvent un mystere inexplicable, & qui l’est en effet dans les systêmes reçus. En consultant l’expérience nous trouverons que nos ames sont soumises aux mêmes loix physiques que les corps matériels. Si la volonté de chaque individu n’étoit, dans un tems donné, mue que par une seule cause ou passion, rien ne seroit plus aisé que de pressentir ses actions ; mais son cœur est souvent assailli par des motifs ou des forces contraires, qui agissent à la fois ou successivement sur lui. C’est alors que son cerveau est ou tiraillé dans des directions opposées qui le fatiguent, ou bien il est dans un état de compression qui le gêne & qui le prive de toute activité. Tantôt il est dans une inaction incommode & totale, tantôt il est le jouet des secousses alternatives qu’il est forcé d’éprouver. Tel est, sans doute, l’état où paroît