Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/276

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comment veut-on que privés une fois des sens nous ayons encore des perceptions, des sensations, des idées ? Puisqu’on a fait de l’ame un être séparé du corps animé, pourquoi n’a-t’on pas fait de la vie un être distingué du corps vivant ? La vie est la somme des mouvemens de tout le corps ; le sentiment & la pensée font une partie de ces mouvemens ; ainsi dans l’homme mort ces mouvemens cesseront comme tous les autres.

En effet par quel raisonnement prétendroit-on nous prouver que cette ame, qui ne peut sentir, penser, vouloir, agir qu’à l’aide de ses organes, puisse avoir de la douleur & du plaisir, ou même puisse avoir la conscience de son existence, lorsque les organes qui l’en avertissoient seront décomposés ou détruits ? N’est-il pas évident que l’ame dépend de l’arrangement des parties du corps & de l’ordre suivant lequel ces parties conspirent à faire leurs fonctions ou mouvemens ? Ainsi, la structure organique une fois détruite, nous ne pouvons douter que l’ame ne le soit aussi. Ne voyons-nous pas durant tout le cours de notre vie, que cette ame est altérée, dérangée, troublée par tous les changemens qu’éprouvent nos organes ? Et l’on veut que cette ame agisse, pense, subsiste lorsque ces mêmes organes auront entiérement disparu !

L’Etre organisé peut se comparer à une horloge, qui une fois brisée, n’est plus propre aux usages auxquels elle étoit destinée. Dire que l’ame sentira, pensera, jouira, souffrira après la mort du corps, c’est prétendre qu’une horloge, brisée en mille pièces, peut continuer à sonner ou à marquer les heures. Ceux qui nous disent que no-