Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/283

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Malgré la simplicité de ces réflexions rien de plus rare que les hommes véritablement affermis contre les craintes de la mort ; le sage lui-même pâlit à son approche ; il a besoin de recueillir toutes les forces de son esprit pour l’attendre avec sérénité. Ne soyons donc point surpris si l’idée du trépas révolte tant le commun des mortels ; elle effraie le jeune-homme ; elle redouble les chagrins & la tristesse de la vieillesse accablée d’infirmités ; elle la redoute même bien plus que ne fait la jeunesse dans la vigueur de son âge ; le vieillard est bien plus accoutumé à la vie ; d’ailleurs son esprit est plus foible & a moins d’énergie. Enfin le malade dévoré de tourmens, & le malheureux plongé dans l’infortune osent rarement recourir à la mort, qu’ils devroient regarder comme la fin de leurs peines.

Si nous cherchons la source de cette pusillanimité nous la trouvons dans notre nature qui nous attache à la vie, & dans le défaut d’énergie de notre ame que bien loin de fortifier tout s’efforce d’affoiblir & de briser. Toutes les institutions humaines, toutes nos opinions conspirent à augmenter nos craintes & à rendre nos idées de la mort plus terribles & plus révoltantes. En effet la superstition s’est plue à montrer la mort sous les traits les plus affreux ; elle nous la représente comme un moment redoutable qui, non seulement met fin à nos plaisirs, mais encore qui nous livre sans défense aux rigueurs inouies d’un despote impitoyable, dont rien n’adoucira les arrêts : selon elle l’homme le plus vertueux n’est jamais sûr de lui plaire, il a lieu de trembler de la sévérité de ses jugemens ; des supplices affreux & sans fin puniront les victimes de son caprice des foiblesses involontaires ou des fautes nécessaires qui auront