Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/290

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inventée, dit-on, par les mages, trouve encore un grand nombre d’adhérens, qui ne l’ont jamais sérieusement examinée. Enfin d’autres incapables de s’élever à ces notions sublimes, crurent que sous diverses formes l’homme animeroit successivement différens animaux d’espèces variées, & ne cesseroit jamais d’habiter la terre où il se trouve ; telle fut l’opinion de ceux qui crurent la Métempsycose.

Quant au séjour malheureux des ames, l’imagination des imposteurs qui voulurent gouverner les peuples s’efforça de rassembler les images les plus effrayantes pour le rendre plus terrible. Le feu est de tous les êtres celui qui produit sur nous la sensation la plus cuisante ; on supposa donc que la toute-puissance divine ne pouvoit rien inventer de plus cruel que le feu pour punir ses ennemis ; le feu fut donc le terme auquel l’imagination de l’homme fut forcée de s’arrêter, & l’on convint assez généralement que le feu vengeroit un jour la divinité outragée, comme, par la cruauté & la démence des hommes, cet élément la venge souvent en ce monde[1]. Ainsi l’on peignit les victimes de sa colère enfermées dans des cachots em-

    frantes ou jouissantes apres leur séparation du corps : ils doivent supposer, comme Berkeley, que l’ame n’a besoin ni du corps, ni d’aucun être extérieur pour éprouver des sensations & avoir des idées. Les Malebranchistes doivent supposer que les ames réprouvées verront l’enfer en Dieu & se sentiront brûler, sans avoir besoin de leurs corps pour cela,

  1. C’est, sans-doute, de-là que sont venues les expiations par le feu, usitées chez un grand nombre de peuples orientaux, & pratiquées encore aujourd hui par des prêtres du Dieu de paix, qui ont la cruauté de faire périr par les flammes ceux qui n’ont point de la divinité les mêmes idées qu’eux. Par une suite du même délire les Magistrats civils condamnent au feu les sacrileges, les blasphémateurs, les voleurs d’Église ; c’est-à-dire ceux qui ne font tort à personne tandis qu’ils se contentent de punir d’un supplice plus doux ceux qui font un tort réel à la société. C’est ainsi que la religion renverse toutes les idées !