Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/341

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le méchant : sujet ainsi que l’homme de bien à des infirmités & aux caprices du sort, il ne trouve dans le fond de son cœur que des soucis, des regrets, de remords ; il s’affaisse sur lui-même ; il n’est pas soutenu par sa conscience, son esprit & son corps se trouvent accablés de tous côtés à la fois. L’homme de bien n’est point un stoïcien insensible ; la vertu ne procure point l’impassibilité ; mais s’il est infirme, il est moins à plaindre que le méchant malade ; s’il est indigent, il est moins malheureux que le méchant dans sa misère ; s’il est dans la disgrace, il est moins accablé que le méchant disgracié.

Le bonheur de chaque homme dépend de son tempérament cultivé ; la nature fait les heureux ; la culture, l’instruction, la réflexion font valoir le terrein que la nature a formé, & le mettent à portée de produire des fruits utiles. être heureusement né pour soi-même, c’est avoir reçu de la nature un corps sain, des organes agissans avec précision, un esprit juste, un cœur dont les passions & les desirs sont analogues & conformes aux circonstances dans lesquelles le sort nous a placés. La nature a donc tout fait pour nous, lorsqu’elle nous a donné la dose de vigueur & d’énergie qui nous suffit pour obtenir les choses que notre état, notre façon de penser, notre tempérament nous font désirer. Cette nature nous a fait un présent funeste, lorsqu’elle nous a donné un sang trop bouillant, une imagination trop active, des desirs impétueux pour des objets impossibles à obtenir dans nos circonstances, ou du moins que nous ne pouvons nous procurer sans des efforts incroyables, capables de mettre notre bien-être en danger & de troubler le repos de la société. Les hom-