Page:Homère - Les dix premiers livres de l’Iliade trad. Salel 1545.djvu/231

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Le Hérault donc prend le Billet, & paſſe
De Renc en Renc tout le long de la Place,
En le monſtrant. Mais point ne fut cognu,
Iuſques à tant qu’il eſt es mains venu
Du fort Ajax, qui liſant l’Eſcripture,
Fut tres joyeux de ſi bonne Advanture.
Pour ſien le prend, & puis le jette à terre :
Parlant aux Roys en vray Homme de Guerre.
    C’eſt donc a moy, ainſi que vous voyez
(Mes chers Amyz) je vous ſupply ſoyez
Tous reſjouyz. Ie ſens deſja mon cueur
Qui me promect : que je ſeray vainqueur.
Et ce pendant que je prens mon Armure,
Vous pourrez bien (tout bas & ſans Murmure)
En ma faveur les Dieux haultains prier,
Sans que Troiens vous entendent crier.
Mais qu’ay je dict ? Certes il ne m’en chault,
Priez tout bas, ou bien priez tout hault,
Ie ne crains rien. Car ſi la Nourriture
Faict eſtimer ſouvent la Creature :
Si la Patrie, & illuſtre Lignage,
Aux Hommes faict augmenter le Courage :
Eſtant ainſi, comme je ſuis pourveu
De ces trois dons, il ne ſera pas veu
Que je m’en fuye : ou bien que je delaiſſe,
Ce que doibt faire ung Prince de Nobleſſe.
    Ainſi parla le Grec Audacieux,
Dont ſes Amyz de cueur devotieux,
Pour ſon ſalut feirent Veux & Prieres
À Iuppiter, en diverſes manieres.
Entre leſquelz quelqu’ung mieulx cognoiſſant
Le grand hazard, diſoit. Ô Dieu puiſſant