Page:Homère - Les dix premiers livres de l’Iliade trad. Salel 1545.djvu/254

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Diomedés, qu’il nous fault deſloger.
Fuyons nous en, voys tu pas le danger ?
Le Dieu puiſſant la Victoire depart
Pour ce jourdhuy, à la contraire part.
Vne aultrefois il en ordonnera
Tout aultrement, & la nous donnera.
L’eſprit humain ne ſe doict hazarder
De contredire aux Dieux, ou retarder
Leur volunté. La puiſſance Divine
Eſt du tout grande, il fault qu’elle domine.
    Diomedés adonc luy reſpondit.
Prudent Vieillard, tout ce que tu as dict
Eſt raiſonable : & n’y vueil reſiſter :
Mais ie ne puis que trop me contriſter,
Quand me ſouvient d’Hector, qui me verra
Ainſi fouyr : lequel dire pourra
Ung jour aux ſiens, extollant ſon Audace,
Comme aultreſfois il m’a donné la Chaſſe,
Iuſques aux Nefz. Et ſ’il eſtoit ainſi,
I’aymerois mieulx, que ſans nulle mercy,
Deſſoubz mes piedz ceſte Terre ſ’ouvriſt
Soubdainement, m’engloutiſt & couvriſt.
    Ha que dis tu (Reſpondit lors Neſtor)
Penſeroys tu que l’on en creuſt Hector.
Certainement quand il te nommerait
Laſche & Crainctif, chaſcun eſtimeroit
Tout le contraire. Ilz ont veu trop grand nombre
De leurs Souldards mis en mortel encombre
Par ton Eſpée, Et mainte Femmelette,
Par ton effort, eſtre Veſue & Seulette.
    Diſant ces motz, ſoubdain la Bride tourne
À ſes Chevaulx, recule & ſ’en retourne