Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/43

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Au palais il rentra, pris de douleur amère.
Il trouva dans la cour les galants, toujours vains,
Dépouillant des chevreaux, flambant des porcs à terre.

Antinoüs, riant, courut l’interpeller,
S’empara de sa main, et lui dit à voix haute :
« Télémaque verbeux, sans frein, de mal parler,
Comme de mal agir, ne commets plus la faute.
Viens plutôt, comme avant, manger et boire à flots.
Les Grecs te fourniront toute chose complète,
La nef, de bons rameurs, pour t’en aller en quête
De ton illustre père, à la sainte Pylos. »

En ces mots répondit le prudent Télémaque :
« Antine, je ne puis banqueter désormais
Avec des insolents, ni m’amuser en paix.
N’est-ce donc pas assez que, mon toit plusiaque,
Vous l’ayez appauvri, quand j’étais un enfant ?
Présentement adulte, à des bouches notables
Puisant l’instruction, et mon cœur s’échauffant,
J’appellerai sur vous les Kères redoutables,
Qu’à Pylos je m’en aille ou que je reste ici.
Mais, comme passager, je pars, je le proclame,
Car je n’ai pas de nef, pas une seule rame ;
Et sans doute cela vous parut mieux ainsi. »

Sur ce, d’Antinoüs sa main quitta l’étreinte
Brusquement. Les gloutons préparaient leur banquet ;
De rires, de brocards ils remplissaient l’enceinte.
Voici comment l’un d’eux à railler s’appliquait :
« Télémaque à coup sûr médite notre perte.
Aux sables de Pylos, à Sparte, le facond