Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/55

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Partout, au gré d’Achille, en quête de butin,
Ou que nous combattions autour des murs célèbres
De Priam : là périt plus d’un guerrier hautain.
Là gît le fier Ajax ; là gît de même Achille ;
Là Patrocle, en prudence égal à tous les dieux,
Et là mon fils chéri, si beau, si glorieux,
Antiloque, un soldat aussi ferme qu’agile.
Que d’autres maux encor n’avons-nous pas soufferts !
Qui donc tous ici-bas pourrait te les apprendre ?
Lorsque tu resterais cinq, six ans à m’entendre
Conter des fameux Grecs les désastres divers,
Tu repartirais las, avant que je finisse.
Neuf ans, des ennemis, en jouant au plus fin,
La perte on machina : Zeus à peine y mit fin.
Pour l’astuce en ces lieux nul au divin Ulysse
N’osa se comparer, tant il nous supérait
Dans l’art de bien ruser, ton père : l’on te donne
Pour son fils, et te voir infiniment m’étonne.
Tes discours sont les siens ; personne ne croirait
Qu’un jeune homme à ce point fût son écho fidèle.
Durant tout le conflit, le noble Ulysse et moi,
Au conseil, comme au camp, nous n’eûmes de querelle ;
Mais portant même cœur, prudents, de bon aloi,
Nous n’avions qu’un seul but, l’intérêt de la Grèce.
Pourtant, quand sous la cendre Ilion s’enfonça,
Nous étant rembarqués, un dieu nous dispersa.
Zeus préparait alors aux Grecs mainte détresse,
Vu que tous n’étaient pas sages ni scrupuleux.
Beaucoup en conséquence eurent des fins horrides,
Victimes du courroux de la dive aux yeux bleus
Qui, fille du dieu-roi, brouilla les deux Atrides.
Ceux-ci, contre l’usage, et follement hardis,