rant être pris pour un Dieu immortel, sauta de
sang-froid dans l’Ætna enflammé. Que les poëtes
aient le droit de périr à leur gré. C’est tuer un
homme que de le sauver malgré lui. Il n’a point
tenté une seule fois de mourir, et, s’il en revient,
il ne voudra pas n’être qu’un homme et renoncer
à l’amour d’une mort célèbre. On ne voit pas
clairement pourquoi il fait des vers. A-t-il souillé
les cendres de son père, ou a-t-il commis un
inceste dans un lieu frappé par la foudre ? Certes,
il est furieux ; et, comme un ours qui a rompu
de force les barreaux de sa cage, ce lecteur féroce
met en fuite le savant et l’ignorant. Celui qu’il
saisit, il le tient, et il le tue en lisant. C’est la
sangsue qui ne lâche la peau que pleine de sang.
Page:Horace - Œuvres, trad. Leconte de Lisle, I.djvu/269
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art poétique.