d’heure en heure, je suis plus assailli par l’envie.
Si j’ai assisté au théâtre avec Mæcenas, si nous
avons joué au Champ-de-Mars, tous disent : « Ô fils
de la Fortune ! » Si une rumeur inquiétante, venue
des Rostres, court par les rues, quiconque me rencontre m’interroge : — « Ô mon bon, il faut que
tu saches ce qui en est, puisque tu approches des
Dieux : as-tu appris quelque chose des Daces ? » —
« Rien absolument. » — « Tu seras donc toujours
railleur ? » — « Que tous les Dieux me châtient,
si je sais rien ! » — « Et les terres que Cæsar a
promises aux soldats seront-elles Siciliennes ou
Italiques ? » — Quand je jure que je n’en sais rien,
tous m’admirent comme un homme unique et d’une
discrétion irréprochable. Ainsi se perd ma malheureuse journée, non sans ces vœux : — Ô campagne, quand te reverrai-je ? Quand me sera-t-il
permis, tantôt par les livres des anciens, tantôt par
le sommeil et les heures paresseuses, de goûter
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satires.