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MYSTÉRIEUX
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— Quant à cela, mon oncle, c’est mon affaire. En attendant, je veux donner à souper à ces braves gens, qui ne sont pas trop fiers pour se rappeler Michel Lavergne. Si vous voulez me fournir à souper pour mon argent, soit ; sinon, il n’y a que deux lieues et demie d’ici au « fort » d’Yamachiche, où l’on ne me fermera pas au nez la porte de l’auberge des Voyageurs de l’hospitalier François Gélinas, une qui ne ment pas à son nom, celle-là, m’at-on dit.

— Non, Michel, comme quinze ans ont passé sur ta tête, j’espère que tu es corrigé. Tu ne quitteras pas ma maison à l’heure qu’il est, et tu auras ce que tu voudras raisonnablement demander, mais je voudrais être sûr que cet or a été gagné légitimement.

— Mon oncle, j’ai été dans le pays où l’on n’a que la peine de le ramasser.

— Sur mon crédit, s’exclama le colporteur Santerre, ce serait un excellent pays pour y trafiquer.

— Sans nul doute, reprit Michel ; les toiles, les rubans, les soieries rapporteraient un profit incalculable dans un pays où l’or se ramasse parmi les cailloux. Eh bien ! si tu es toujours le hardi gaillard qui m’aidait à alléger les branches des arbres du jardin des récollets pendant la saison des fruits, tu vendras ce que tu as ou prétends posséder, nous partirons sur un navire que tu achèteras et dont je serai le commandant, et vogue la galère ! nous voilà en route pour cette fameuse contrée avec une belle et bonne pacotille dans la cale.

— Ne l’écoutez pas, M. Santerre, interrompit l’aubergiste ; la mer a un appétit insatiable ; elle peut avaler toutes vos richesses en un clin d’œil. Quant à l’eldorado de Michel, ne vous y fiez pas ; s’il existe, c’est qu’il l’a trouvé dans la poche de quelque oison de l’espèce la plus naïve. Allons, j’invite tout le