Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/128

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II

La belle destinée de Lamartine l’abandonna à sa chute du pouvoir. Il perdit tout. Ses meilleurs amis se consolèrent, trouvant qu’il avait été jusque-là trop heureux. L’homme est ainsi fait qu’il n’aime pas l’homme de génie s’il est heureux. C’est ce qui explique son adoration pour Molière trahi par sa femme, pour Corneille raccommodant ses chausses, pour La Fontaine pauvre recueilli par madame de la Sablière. Il s’éloigne déjà de Racine, parce que Racine est familier de la Cour ; il ne le plaint pas si l’ami de madame de Maintenon meurt d’un mauvais regard de Louis XIV. Il aime Homère mendiant, Shakespeare misérable, Camoëns mourant de faim et le Tasse mourant de folie. Il aime Voltaire exilé et Victor Hugo proscrit. Il aime Alfred de Musset