Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/191

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gner à perdre une heure de ce bonheur-là ; on ne pouvait se faire à l’idée d’une séparation forcée. Que vous dirai-je ? Le bonheur n’a pas de lendemain, parce que Dieu a voulu faire aimer le ciel.

On vécut ainsi plus de dix ans, plus de dix siècles de joies, si on compare ces années de solitude heureuse aux années vaines du monde ; moins de dix jours, si on contemple l’image rapide et fuyante de ces dix années d’amour et de poésie, ces dix années de paradis terrestre !

Un jour, le soleil du bonheur se voila, le ciel bleu de l’amour se couvrit de teintes livides ; un cœur fut déchiré et jeta un grand cri ; sa vie était close par la pierre qu’on roulait sur une tombe nouvelle : de Latouche venait de mourir.

Quand toutes les mélodies de la vie et de l’amour bruissaient dans ces deux cœurs, ils s’étaient juré, un soir d’extase, que la mort même ne briserait pas leur union. De Latouche