Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/288

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Muette. Je l’y ai rencontré pourtant plus d’une fois, mais il jurait ses grands dieux qu’il ne venait pas pour la musique.

On peut dire d’Auber qu’il a fait le beau pendant près d’un siècle. Il y a des moments de distraction où je me demande s’il est vraiment mort, ce grand musicien qui avait vu guillotiner André Chénier et qui dînait chez moi pendant le siège de Paris. Je l’entends encore nous contant la mort d’André Chénier et nous disant : « J’ai quatre-vingt-onze ans : on aura beau guillotiner à la place de la Bastille, à la place du Trône ou à la place de la Concorde : je ne serai plus là, parmi les spectateurs. »

Et sur ces mots, comme pour reprendre un regain de jeunesse, Auber baisa les bras de Sarah Bernhardt et de Marie Roze.

Très peu de temps auparavant j’avais vu Auber à un des lundis de l’impératrice ; il conduisait l’orchestre pour le concert où, d’ailleurs, on n’avait indiqué que son répertoire.