Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/9

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les embrasements de la passion. Il tomba à genoux et rima des stances bien allumées, car, en ce critique, il y avait aussi un poète. Il rima tout un volume.

Profondément jalouse de la maîtresse, la femme, presque abandonnée, ne dédaigna pas de lire les vers de Sainte-Beuve, et Sainte-Beuve s’imagina qu’un jour ou l’autre il prendrait la femme d’assaut. Sainte-Beuve comptait sur l’esprit de vengeance mais, outre qu’il était fort laid, elle était fort vertueuse. Ce fut alors que, perdant la tête, Sainte-Beuve publia ce fameux Livre d’amour dont on a tant parlé, livre de feu et de flammes. Ce petit monument élevé à la beauté de madame Victor Hugo c’était une mauvaise action pire que tous les crimes de Don Juan, puisqu’on ne doutait pas, en lisant les vers, que le poète n’eût pas triomphé.

À ce propos, je vais donner une lettre que m’écrivit Sainte-Beuve après avoir repris partout où il pouvait le Livre d’amour. Il