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LABRADOR ET ANTICOSTI

Paspébiac. De là on l’expédie en Italie, à la Barbade, mais surtout au Brésil qui est le principal marché. On charge ainsi, chaque année, une vingtaine de navires de quatre à cinq cents tonneaux.

La maison LeBoutillier emploie, sur la Côte Nord, environ quatre-vingts hommes du pays, et cent vingt du Sud, qui s’en retournent chez eux à la fin du mois d’août. L’agent principal de la Côte, résidant à Magpie, est un M. LeBoutillier, né en Angleterre, mais élevé à Saint-Malo. Sa courtoisie et sa parfaite distinction nous ont été particulièrement agréables.

Ces représentants des armateurs, qui dirigent les établissements de pêcherie fixés aux différents postes, ne passent ici que le temps de la pêche et reviennent à la Gaspésie vers le mois de novembre. Ils ne voudraient pas, pour tout au monde, rester sur la Côte durant l’hiver, estimant qu’on ne saurait exiger d’un homme qu’il s’ennuie mortellement plus que six mois par année. Ces agents, qui parlent tous l’anglais et le français, sont généralement des Jersais. Les maisons qu’ils habitent aux différents postes sont de confortables demeures, dont l’apparence est fort proprette. Ces messieurs ont presque toujours les plus grands égards pour les missionnaires.

Samedi, 29 juin. — Le Str Otter, parti de Québec samedi, le 22 juin, aurait dû passer ici dans la nuit de lundi à mardi ; mais la tempête de vent d’est qui a duré tant de jours, a rendu son voyage très rude, et il n’est arrivé ici que jeudi midi. Pour des gens d’autant plus affamés de nouvelles qu’ils ne savent rien de ce qui s’est passé dans l’univers depuis quinze jours, un retard de soixante heures est quelque chose de très appréciable. Quant à moi, j’avais eu beau me mettre à la ration pour lire les journaux et les revues que m’avait apportés le courrier précédent, je n’avais plus rien à lire, et j’ai connu les horreurs de la famine littéraire… Enfin, des dépêches arrivèrent, signalant d’heure en heure le passage de l’Otter à ses différentes stations d’arrêt ; et l’Otter lui-même, de son pas tranquille et lent, s’en vint jeter