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LABRADOR ET ANTICOSTI

ils ont eu assez de peine à se rendre jusqu’en Bretagne et en Hibernie. Quoi qu’il en soit de ces préoccupations ethnologiques, revenons à nos saumons, et constatons qu’à cette même rivière M. Robinson possède un rets tendu pour en prendre. À la Pointe du « Sorouêt », il y a encore un rets à saumon. Il ne paraît pas qu’il y en ait d’autres ailleurs.

La place est fort bonne pour la pêche du flétan, que les traders achètent en salaison. On trouve ici que ce poisson donne autant de bénéfices que la morue.

Au point de vue agricole, il n’y a que de bonnes choses à dire de l’Anse-aux-Fraises. Le blé même a mûri, me dit-on, quand on l’a cultivé. Avoine, orge, mil, trèfle rouge, trèfle blanc, blé d’Inde, choux, navets, oignons, etc., tout vient à souhait. Quant aux fraises, puisqu’il en faut parler dans un endroit qui leur emprunte son nom, il y en a en abondance, et, le 8 juillet, on nous en a servi d’excellentes ; l’époque de leur maturité est cependant un peu en retard en comparaison d’autres endroits de la province de Québec.

Et puis, chevaux et bêtes à cornes trouvent ici le climat de leur goût, et vivent tant qu’on les laisse vivre.

Quand on veut fumer les terres, il n’y a que l’embarras du choix : la mer est là qui apporte le goémon en quantité ; puis il y a le hareng et les déchets de morue.

Je n’ai donc qu’un bon témoignage à donner de l’Anse-aux-Fraises. On y vit vraiment assez bien. La pêche, me dit-on, peut y faire gagner deux à trois cents piastres à chaque propriétaire ; puis, si l’on se livre aussi à la chasse, chasse à l’ours noir, à la marte, au renard, à la loutre, c’est encore de cent à deux cents piastres à ajouter au revenu annuel. Eh bien, un tel revenu, en ces endroits, c’est l’aisance. Car les occasions de dépenser mal à propos son argent n’y sont pas fréquentes comme dans les grands centres de population. Ces Anticostiens n’ont pas à se défendre de la tentation d’aller s’amuser dans les « saloons » ; les « cirques » n’ont encore jamais songé à aller faire moisson d’écus sur la grande île ; les « excursions à bon marché »,