Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/161

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vait faire le mal, en s’abandonnant à la concupiscence, et faire le bien avec la grâce de Dieu. L’éloquent missionnaire excita les applaudissements unanimes de l’assemblée et fut proclamé le vainqueur de cette lutte philosophique. Sa réputation allait ainsi toujours grandissant, et les zélés religieux s’en réjouissaient en Dieu, parce qu’ils voyaient dans cette estime universelle comme un germe heureux de nombreuses conversions à la foi chrétienne.

Un événement assez bizarre vint encore augmenter le crédit que le P. Ricci s’était acquis par sa science. Peu de jours après la discussion solennelle dont nous venons de parler, le président de la cour des travaux publics vint visiter les missionnaires. Lorsqu’il eut complimenté le P. Ricci sur le triomphe qu’il avait obtenu en présence des lettrés, il lui exprima combien les magistrats de Nanking désiraient le voir se fixer pour toujours dans leur ville. Tels étaient aussi les vœux du P. Ricci, et, pour les réaliser, il n’attendait que l’occasion d’acheter une maison à sa convenance. Le président des travaux publics lui dit alors qu’il lui vendrait volontiers, au nom de l’État, un palais qu’il avait fait construire depuis quelques années pour la résidence d’un magistrat, mais qui jusqu’à ce jour avait été inhabité, parce qu’il était hanté par les Kouy ou esprits malins. Les bonzes et les docteurs de la raison s’y étaient rendus plusieurs fois pour y pratiquer leurs cérémonies d’exorcisme ; diverses personnes avaient essayé d’y habiter, mais elles avaient été forcées de déloger bien vite, parce qu’on y entendait des bruits étranges, des voix plaintives, et que pen-