Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/195

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jongleurs et de comédiens qu’on rencontre presque à chaque pas. Il y avait à la foire de Tchao-Tcheou une troupe de bateleurs qui attirait la population tout entière et excitait, par ses représentations, les rires inextinguibles des spectateurs. Ces comédiens arrivaient de Macao. Les pièces qu’ils jouaient avaient pour but de ridiculiser les Portugais, ou pour mieux dire les Européens, les diables de l’Occident. La scène était entourée d’immenses tableaux peints par les Chinois, et représentant en caricature les costumes et les mœurs des étrangers de Macao. On donnait de ces tableaux des explications si pleines de verve et de raillerie qu’à chaque instant l’orateur était interrompu par d’immenses éclats de rire. Les Chinois ne pouvaient se lasser de contempler ces habits étriqués, ces figures rouges, avec de grands yeux ronds et des nez interminables. Après l’exhibition des tableaux, on représenta des scènes ignobles, où les acteurs déguisés en Portugais, jouaient des rôles tour à tour atroces, infâmes et ridicules. Les cérémonies chrétiennes étaient également parodiées et livrées à la risée de la multitude. Ces mascarades hideuses et burlesques, dont les Chinois aimaient à se repaître les yeux et les oreilles, entravèrent beaucoup les succès des missionnaires. Cependant, cette fâcheuse impression s’effaça peu à peu. Les Chinois de Tchao-Tcheou avaient au milieu d’eux des Européens, et il leur était facile de juger par eux-mêmes que ces hommes n’étaient ni méchants ni ridicules.