Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

frances, lui firent envisager la mort avec une douce sérénité, et il s’écria comme le vieillard Siméon : « Maintenant, Seigneur, vous renvoyez votre serviteur en paix selon votre parole, parce que mes yeux ont vu votre salut. » Ses yeux, en effet, avaient vu dans la lettre de l’apôtre de la Chine que la lumière de l’Évangile se révélait aux nations les plus reculées, et que le jour de la rédemption semblait luire pour ces peuples du Cathay qu’il était venu chercher des extrémités de l’Inde. Cette vive émotion, qui l’avait ranimé un instant, acheva de lui enlever le peu de forces qui lui restaient ; bientôt il n’entendit plus les paroles de Ferdinand, il ne pouvait plus même relire la lettre du P. Ricci, mais il la garda pressée sur sa poitrine, et mourut ainsi avec les plus vifs sentiments d’affection pour les apôtres qui travaillaient avec tant de zèle à la gloire de Dieu et au salut des âmes. Il avait accompli avec une persévérance et un courage inébranlables la mission qui lui avait été confiée ; son voyage avait mis hors de doute l’identité du Cathay et de la Chine, de Khanbalu et de Péking. De nos jours, de savants orientalistes ont fait à ce sujet de longues dissertations qui ne valent assurément pas la démonstration du P. Goès.

Pendant la maladie de cet intrépide missionnaire, plusieurs habitants de Sou-Tcheou lui témoignèrent beaucoup d’intérêt et le soignèrent avec une remarquable assiduité. Mais leur charité n’était ni bien pure ni bien désintéressée. Ils le pillèrent avec d’autant plus d’effronterie qu’ils voyaient sa maladie faire plus de progrès. Ses meilleurs morceaux de jade disparurent, et ce qu’il y eut surtout d’à jamais regrettable,