Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/246

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sieurs années que nous attendons la manifestation de votre volonté jusqu’à ce jour ; cependant la pension alimentaire ne nous a jamais manqué, quoique notre mérite soit réellement nul.

« La trente-huitième année de Wan-Lié et le dix-huitième jour de la troisième lune, Matthieu Ricci, déjà avancé en âge, est mort de maladie, et moi je suis demeuré orphelin, et digne peut-être que chacun ait pitié de ma douleur et compassion de mes souffrances. La route pour retourner en mon pays est fort longue, et les marins ont crainte de porter des corps morts dans leurs navires[1]. C’est pourquoi il ne m’est pas possible de prendre avec moi son cercueil et de retourner avec lui dans ma contrée. Mais considérant que nous vivons déjà depuis plusieurs années sous la protection de Votre Majesté, nous pouvons être comptés au nombre de vos sujets ; ainsi, Votre Clémence, comme celle de Yao[2], ne sera pas bornée à l’Empire Central, mais s’étendra aussi à tous les royaumes étrangers. Puisque durant notre vie nous sommes nourris par la munificence impériale, nous espérons qu’étant morts elle nous accordera un peu de terre pour recouvrir nos corps. Notre espérance est d’autant plus grande que Matthieu Ricci, depuis son entrée dans l’empire, a étudié avec soin les lettres et s’est appliqué aux vertus que les livres enseignent. Jour et nuit il allumait, avec une grande pureté d’es-

  1. Il est d’usage en Chine que les corps de ceux qui sont morts loin de leur pays soient transportés chez eux pour être ensevelis dans la sépulture de famille.
  2. Fondateur de la monarchie chinoise.