Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cognus aux Chinois[1], afin que sa renommée s’espandit en peu de temps par tout le monde.

« Je n’oublierai pas aussi ce qu’il inventa pour gaigner la bonne grâce des Chinois. Les Chinois croient bien que le ciel est rond, mais toutefois ilz estiment que la terre est carrée, au milieu de laquelle ilz se font asseurement acroire que leur empire est situé. Pourquoi ilz portoient impatiemment que leur Chine fust par nos géographes rejettée en un coin de l’extrémité d’orient. Et pour autant qu’ilz n’estoient pas encore assez capables d’entendre les démonstrations des mathématiques par lesquelles on prouveroit facilement que la terre avec la mer faict un globe, et qu’au globe, par la nature de la figure circulaire, ne se trouve ni commencement ni fin, il changea un peu nostre project, et rejetant le premier méridien des isles Fortunées aux marges de la description géographique, à droite et à gauche, il fit que le royaume de la Chine se voyait au milieu de la description à leur grand plaisir et contentement. » Après ces détails, le P. Trigault ajoute avec beaucoup de naïveté : « Véritablement on n’eust pu, en ce temps-là, trouver une invention plus propre pour disposer ce peuple à recevoir les mystères de notre religion[2]. »

Au fait, cette mappemonde, quoique un peu irrégulière, pouvait cependant obtenir un excellent résultat, en contribuant à détruire une préoccupation qui a toujours été un des plus grands motifs de la haine des Chinois contre les étrangers. Dès l’origine, ils ont

  1. Nous avons vu combien se trompait le P. Trigault, en pensant que les PP. Roger et Ricci étaient les premiers apôtres de la Chine.
  2. Trigault, p. 154.