Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/95

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bien logé, bien vêtu, bien nourri. Mais Martin était célibataire ils lui achetèrent une femme et le marièrent. À force de présents et de cajoleries, nos deux excellents alchimistes obtinrent de lui qu’il leur transmettrait le fameux secret, aussitôt qu’il l’aurait reçu du P. Roger ; mais tout cela devait se faire avec une extrême prudence, parce que si le père spirituel venait à se douter de quelque chose, tous les plans échoueraient.

Trois ou quatre mois se passèrent de la sorte, et Martin vivait toujours dans l’abondance. Enfin il alla trouver ses généreux confidents, et leur annonça l’heureuse nouvelle que le jour de la grande manifestation allait arriver. Le P. Roger devait le lendemain, sans plus de retard, lui enseigner la recette pour la transmutation du mercure en argent, et il s’empresserait de la leur communiquer. Le lendemain, Martin ne parut pas chez les chrétiens alchimistes, qui l’attendaient pleins d’émotion et d’anxiété. Le surlendemain, point de nouvelle de Martin ; on le chercha partout sans le trouver nulle part. On sut enfin qu’il avait fui de Tchao-King et qu’il s’était sauvé à Canton, emportant plusieurs objets de prix qu’il avait volés à la mission et des sommes assez considérables empruntées à divers néophytes de Tchao-King. Si c’était là la recette de Martin pour faire de l’argent, il est évident qu’il n’était nul besoin d’en faire un mystère ; car les Chinois la connaissent et la pratiquent parfaitement depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours.

La disparition de Martin fit grand bruit en ville, surtout parmi les chrétiens, dont la plupart étaient victimes de ce scélérat. Les mandarins en ayant été