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OUVRAGES DE VIOTTI. 89

possession de la faveur publique : il avait le talent de plaire, ce qui devrait toujours être l'annonce du vrai talent, si, pour bien apprécier celui-ci, il ne fallait pas embrasser l’art sous un point de vue général, et avoir égard à ce qui a précédé comme à ce qui a suivi. En ce temps, Gaviniés ne se faisait plus entendre, et Lamothe n’avait point encore paru. Jarnowick était donc le premier à Paris, comme Viotti le fut depuis en Europe.

Mais la vogue de l’un passa bientôt : la célébrité de l’autre dure encore et durera toujours. Les productions du génie portent en elles un principe de vie qui garantit leur durée, ou plutôt, qui leur assure une existence éternelle.

Composition de Viotti. On y remarque trois époques.

"Les ouvrages de Viotti[1] sont du nombre de ceux dont l’expression vraie ne saurait cesser d’émouvoir. La musique instrumentale a pour base la musique vocale ; la voix humaine est le type auquel tous les systèmes doivent se rattacher : elle est pour la musique cette nature que les autres arts invoquent comme leur modèle, qui, seule, peut empêcher le goût de se dépraver, et le génie d’enfanter des monstres. Tel fut le guide que Viotti suivit sans cesse. Il suffit de prononcer son nom pour rappeler tout ce que la mélodie offre de plus capable de toucher le cœur et d’élever l’àme. Il avait adopté la maxime de Tartini : per ben suonare, hisogna ben cantare, et personne ne sut mieux que lui la mettre en pratique. La musique n’était pour Viotti que l’expression du sentiment[2].

» L’expérience, qui modifie tous les talents, adonné au

  1. Baillot, Notice sur Viotti.
  2. Si l'admiration de tous pouvait se fixer sur un seul, on vous dirait que le violon n’a jamais été plus grand, plus beau que sous l'archet de Viotti, dans cette brillante carrière qu’il a parcourue en triomphe avec la noble et touchante simplicité de son style, le grandiose et la magnificence de ses concertos (Baillot, Art du violon, page 8, Paris, Heugel.)