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CHOSES VUES
I




RÉCITS DE TÉMOINS OCULAIRES.




I

L’EXÉCUTION DE LOUIS XVI.


Personne n’a donné sur l’exécution de Louis XVI certains détails minutieux et caractéristiques qu’on va trouver ici, écrits pour la première fois, rapportés par un témoin oculaire[1].

L’échafaud ne fut pas dressé, comme on le croit généralement, au centre même de la place, à l’endroit où est aujourd’hui l’obélisque, mais au lieu que l’arrêté du Conseil exécutif provisoire désigne en ces termes précis : « entre le pied d’estal et les Champs-Élysées ».

Qu’était-ce que ce piédestal ? Les générations actuelles qui ont vu passer tant de choses, s’écrouler tant de statues et tomber tant de piédestaux, ne savent plus trop quel sens donner aujourd’hui à cette désignation si vague et seraient embarrassées de dire à quel monument avait servi de base la pierre mystérieuse que le Conseil exécutif de la Révolution appelle laconiquement le pied d’estal. Cette pierre avait porté la statue de Louis XV.

Notons en passant que cette place étrange, qui s’est appelée successivement place Louis XV, place de la Révolution, place de la Concorde, place Louis XVI, place du Garde-Meuble et place des Champs-Élysées, et qui n’a pu garder aucun nom, n’a pu garder non plus aucun monument. Elle a eu la statue de

  1. Ce témoin oculaire était un nommé Leboucher qui, arrivé de Bourges à Paris en décembre 1792, avait assisté de près à l’exécution de Louis XVI. Il raconta, en 1840, à Victor Hugo, la plupart de ces détails, qui avaient, on le conçoit, laissé dans son esprit une trace profonde. (Note de l’éditeur.)