Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome I.djvu/149

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portable, celle de te voir douter de moi, je te demande cela comme une grâce ; si mes paroles sont vaines devant toi, si tu ne te donnes pas la peine de croire à mon amour, du moins, je t’en supplie, ne me montre pas ce dédain à découvert ; laisse-moi penser que tant de paroles, tant d’actions d’amour depuis si longtemps n’ont pas été perdues ; que je ne suis pas sans t’avoir inspiré quelque confiance. Ou, si c’était me tromper que de me laisser croire cela, alors dis-le-moi une seule fois froidement et sans pitié, dis-moi que tu ne crois à aucune de mes paroles, que peu t’importe mon amour, et laisse-moi mourir.

Tu m’as rappelé ce soir, Adèle, tout ce que tu as fait, tout ce que tu daignerais faire pour moi. Hélas ! le jour où tu as laissé tomber ton regard sur moi, tu as plus fait que je ne ferais en donnant ma vie. Tu avais bien raison de me demander ce soir ce que signifierait ma mort. Elle ne serait autre chose qu’un témoignage du plus grand amour qui ait jamais été inspiré par une créature humaine, la plus angélique des créatures, à la vérité.

Adieu. Quand je songe que je ne puis t’offrir que ma mort en échange d’un de tes regards ou d’une de tes paroles, je suis effrayé de mon néant.

Adieu, mon Adèle, permets-moi de dire mon Adèle adorée, quoique tu ne me croies pas. Je souffre beaucoup, il n’aurait tenu qu’à toi de me guérir ce soir. Tu ne l’as pas voulu, que ta volonté soit faite !

Adieu, ange, je vais lire ta lettre bien-aimée, et la baiser, ainsi que tes cheveux et tout ce qui m’appartient vraiment de toi. Adieu.