Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome II.djvu/121

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paraîtra. Préviens mon Victor. Qu’il se prépare à venir. C’est absolument indispensable. Je t’écrirai de quelle façon et où nous nous rejoindrons.

Janin m’a encore écrit une lettre charmante où il me parle beaucoup de toi.

Chère amie, j’ai improvisé ce volume en un mois. J’ai travaillé presque nuit et jour. La grande affaire de Londres ne va pas mal. Le capitaliste est trouvé. Mais il ne veut faire que de la littérature. En Angleterre, ils ont peur de la démocratie.

En attendant je forme ici une association littéraire (et politique) des proscrits. Vois Guyot, et demande-lui un exemplaire de l’acte d’association des auteurs dramatiques ; vois Louis Desnoyers et demande-lui un exemplaire de l’acte d’association des gens de lettres. Cela me servira de base. Parle-lui aussi de Charles qui fait un roman et travaille beaucoup. J’en suis très content.

Ne parle encore à personne de Napoléon-le-Petit, excepté à Auguste et à Paul Meurice, en leur recommandant le secret. Il faut que cela tombe comme une bombe.

J’ai encore mille et cent mille choses à te dire, mais la poste me presse. À bientôt tous. Écris-moi ainsi que ma Dédé, ainsi que mon Toto. Je vous aime tous[1].


À Jules Janin.


Bruxelles, 1er juillet 1852.

Je n’ai votre lettre que d’hier, cher Janin, Mme  Thuillier étant venue sans me trouver. Je la prie de se charger de ce mot pour vous. Continuez-moi vos lettres ; elles m’apportent de la joie, c’est-à-dire de la force. Nous en avons besoin dans cet exil ; le ciel s’en mêle, il pleut, il fait froid ; la nature est toute triste et a l’air de pleurer. Je le comprends, pour peu qu’elle ne soit pas bonapartiste.

Vous n’avez jamais écrit une plus ravissante et plus admirable page que celle où vous me contez votre visite à ma pauvre maison. Une femme d’ici, me voyant ému hier soir, moi qui porte durement et gaiement la proscription, m’a dit : « Qu’avez-vous donc ? » Je lui ai lu cette page de votre lettre. Elle a pleuré, et elle a voulu la copier. À côté de vos grands triomphes éclatants de poëte, de critique et d’écrivain, enregistrez, je vous prie, ce succès

  1. Bibliothèque Nationale.