Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome II.djvu/172

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M. Mœrtens peut dire (27 juin) : Je ne vois aucune indication de suppression pour l’expurgée. Faisons attention à tout, car il résulte de cette inattention que l’expurgée n’a pas été commencée, retard à ajouter aux autres. À ce propos, je demande si vous avez cru nécessaire de faire, même dans la complète, la suppression des noms que j’indiquais pour ce vers :

Rouher, cette catin, Troplong, cette servante.

Répondez-moi à ce sujet.

Je répète, en outre, que vous pouvez ajouter à mes suppressions toutes les suppressions que dans votre prudence vous jugerez utiles.

2° Vos calculs à tous sont inexacts et rien de plus facile à voir. Il y aura 87 pièces détachées ; j’en ajouterai deux, ce qui fera 895 le blanc du haut et le blanc du bas font perdre à peu près une page par pièce ; mettons seulement 80 pages blanches ; ajoutez 9 faux-titres, le titre, la préface et la table, cela fait 100 pages. Eh bien, dites-vous, c’est cela ! Avec 194 pages (à 32 vers par page), cela fait 294 pages. Nullement, il n’y aura point 32 vers par page. En dehors des pages blanches ci-dessus, il ne faut compter, à cause des alinéas, des chiffres et des entre-strophes qu’environ 20 vers par page, cela fait donc pour 6 240 vers juste 312 pages. Ajoutez les 100 pages : 412. Maintenant ajoutez 30 pages de notes, vous aurez au minimum 442 pages (en serrant beaucoup). Napoléon-le-Petit en avait 462. Vous voyez donc qu’il faut refaire tous vos calculs, et m’envoyer plus de 48 pages par semaine.

Si M. Samuel m’avait écrit ce que vous m’écrivez, l’incident n’aurait pas surgi[1]. Il n’y aurait eu qu’un dissentiment, non sur le fond, mais sur la forme, non de conscience, mais de tactique, sur la question de conduite politique. Rien de plus.

  1. Hetzel lui avait écrit le 4 juillet : « D’accord avec vous sur ce but, l’impossibilité où vous êtes de venir pour le procès, je diffère sur les moyens. Ce n’est pas à vous de dire : je ne viendrai pas ; c’est à votre imprimeur responsable de dire à vous qui voudriez venir : Je ne veux pas que vous veniez. Avant la loi Faider, votre présence à Bruxelles en cas de procès m’aurait couvert, aujourd’hui elle ne me couvrirait peu, à quoi bon offrir deux proies pour une ? Et ceci, Samuel vous le dira, vous l’écrira, et le fera. Mais ce qu’il ne faut pas faire, dans l’intérêt de votre caractère même, ce sont d’une part ces considérants au traité, d’autre part cette préface qui, en faisant voir aux juges et à M. Bonaparte qu’ils n’ont point à redouter votre venue, votre parole, l’éclat qui s’ensuivrait, leur jette en quelque sorte en pâture et d’avance, et votre livre et votre imprimeur abandonné, leur fait en un mot une proie facile à atteindre... Il faut que, tant qu’il n’y aura pas procès, ils redoutent le procès avec vous ; et il faut, quand ils le feront, qu’ils aient ce procès sans vous. Avant le procès nous leur disons : prenez garde, si vous faites le procès, il peut vous en cuire, Victor Hugo peut venir. Le procès arrive. Nous leur disons : Vous imaginez-vous que nous allons souffrir qu’un homme dont la liberté vous est terrible, vienne se livrer à vous et se mettre dans vos mains ? Et c’est alors que l’imprimeur, exécutant ce qu’il aura écrit, vous dira : je refuse votre venue… Réfléchissez, cher ami, et comprenez que la situation est mille fois meilleure pour nous telle que je la fais, que telle que, dans votre sincérité maladroite, passez-moi le mot, vous voulez la faire. »